Drame en 4 parties de Giuseppe Verdi (1813-1901) | Livret de Salvatore Cammarano, complété par Leone Emanuele Bardare, d’après El trovador d’Antonio García Gutiérrez (1836) |

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Comme ces madrigaux anciens mêlant intimement l’amour et la guerre, et avec autant d’intensité à raconter et à chanter, Il trovatore accompagne une révélation : rivaux amoureux, Manrico et le comte de Luna se découvrent, autour de l’objet commun de leur amour Leonora, opposants politiques et frères ennemis. Et la légende de basculer dans leur propre drame. Car c’est au présent que se relatent et se revivent, avec Verdi, les rancœurs ancestrales, superposant conflits familiaux, sorcellerie, vengeance et passion.

L’ouvrage, créé en janvier 1853 à Rome entre Rigoletto et La Traviata, est aujourd’hui l’un des plus populaires du compositeur italien : du héros chevaleresque à l’héroïne sacrifiée, de l’atmosphère fantastique aux échos tziganes de l’Espagne mauresque, la partition recrée, à partir de la pièce originale de Gutiérrez, un univers médiéval aux couleurs romantiques, d’une virtuosité vocale et orchestrale flamboyante.

Choisissant d’en rehausser le caractère épique, Gilbert Deflo, disciple de Giorgio Strehler, associé à La monnaie de Bruxelles de 1981 à 1987 et auteur de plus de deux cents mises en scène d’opéra de Monteverdi au répertoire contemporain, imagine, pour le Liceu de Barcelone en 2009, une esthétique sobre et élégante, atemporelle, directement née du théâtre antique : préférant la stylisation de la tragédie classique et une gestuelle codifiée à l’imagerie figée du XIXe siècle, il confine au dépouillement total de la scène, accusant les contrastes, les passions, les crimes. Sa narration, à distance, va au-delà de l’anecdote et compose, sur un jeu de toiles de fond colorées, une symbolique simple et expressive de la guerre fratricide qui laisse toute sa place au chant.