o_keeffe.jpgL’Icône de la peinture américaine, Georgia O’ Keeffe est peu connue en France. Seul le Centre Pompidou possède un tableau de cette artiste qui a pourtant marqué l’art de son empreinte. Personnage androgyne, libéré et libertaire, elle incarne la femme moderne qui assume ses choix : celui d’un compagnon de 23 ans son aîné, Alfred Stieglitz, photographe connu et reconnu, à la fois mentor, pygmalion, complice, alter ego et même mari !
Les regards d’O’keeffe et de Stieglitz sur la peinture et la photographie se croisent et se complètent, se confortent aussi dans une approche très personnelle du monde et de leur environnement. C’est ce regard nouveau que Georgia O’keeffe pose sur la nature et les fleurs, la ville de New-York et les gratte-ciel, le désert et les ossements blanchis par le soleil du Nouveau Mexique.
Ce que l’on retient de cette œuvre, ce sont d’abord les fleurs ; immenses iris, cannas, amaryllis, pétunias, colorés et voluptueux dont la vibration magnétique évoque sans conteste la sexualité. Ils incarnent la femme dans ses méandres et ses secrets, dans son désir et son plaisir aussi.
Cette femme aimée et désirée retranscrit l’harmonie, la vibration et le mouvement par la couleur (qui n’est pas sans évoquer la palette de Sonia Delaunay). Tout est courbes et enroulements.
o_keef_2.jpgA ces courbes tellement féminines, on peut opposer le côté masculin de la verticalité. Verticalité et érection des gratte-ciel qui se jouent de l’ombre et de la lumière. Présentés en plongée ou en contre- plongée, ils symbolisent la modernité et la vitalité des grandes villes américaines. Le halo de la lune ou le faisceau lumineux d’un réverbère leur confèrent une magie indéniable. Le point lumineux qui émerge de l’ombre n’est sans doute pas sans relation avec la volonté d’abstraction qui sous-tend cette création.
Mais c’est dans le désert du Nouveau Mexique que Georgia O’keeffe retourne régulièrement pour trouver, avec l’horizontalité et l’immensité des paysages, un autre équilibre et une nouvelle source d’inspiration. Les ossements et les carcasses d’animaux, blanchis par le soleil, comme les fleurs voluptueuses de ses débuts, marquent les esprits. Ces squelettes issus du désert donnent matière à des constructions et créations inimitables, identifiables entre toutes.
Faut-il y voir le cheminement inéluctable d’une vie, depuis les turbulences et l’épanouissement de la jeunesse, jusqu’à la sagesse d’une vieillesse amputée du compagnon aimé ? D.VDB