Notre dernière sortie lycéenne était organisée cette année autour du lac de Paladru. Le rendez-vous avait été fixé à la « grange Dîmière » au Pin.

La grange Dîmière est une dépendance du Monastère des Chartreux de la Sylve Bénite, modeste ermitage au départ, créé en 1116, sur des terres données par le Seigneur de Virieu. Ce nom viendrait de la vision qu’aurait eue un des six moines fondateurs, d’une main bénissant la forêt.
Avant de découvrir la grange, nous sommes parties à pied, accompagnées de Steve Vachet, spécialiste du Pays Voironnais, en quête du monastère, le 3e de la Grande Chartreuse.
De ce monastère, il ne reste que des vestiges, vraisemblablement des bâtiments communautaires, l’ensemble ayant été pillé à la fin du XVIe siècle durant les guerres de religion, puis pendant la révolution française. Aujourd’hui propriété privée, il n’est pas accessible au public. Nous avons cependant pu longer le mur d’enceinte et imaginer son emplacement d’origine ainsi que la vie monastique dans ce vallon isolé.
Après cette petite escapade, nous retrouvons la grange « Dîmière », véritable cathédrale agricole par ses dimensions. Elle était destinée à collecter, d’où son nom, la dîme, impôt reversé par les seigneurs utilisant les biens des Chartreux.
Edifié sur une pente, ce bâtiment imposant : 35 m de long, 22,5 m de large et 18m de haut, est construit avec un soubassement de galets maçonnés provenant de moraines glaciaires et des murs en pisé. La charpente est soutenue par des piliers en chêne, recouverte de tuiles écailles.
Elle est constituée de deux niveaux : un niveau inférieur l’étable, réservée aux animaux et un supérieur, la grange constituée à l’origine de cinq nefs, pour le stockage des récoltes. On peut lire sur la pierre centrale du porche principal, la date de 1655 sous le sigle des Chartreux : un globe terrestre surmonté d’une croix.
Pour préserver le silence, règle de vie des Chartreux, la grange est éloignée du monastère. Les moines vivent de leurs ressources : cultures, élevage (seulement pour le lait, la viande est revendue) pisciculture et exploitation de la forêt.
A la suite d’un incendie en 1906 le bâtiment a diminué de moitié. Cette grange, grâce à d’importants travaux de conservation et restauration a été transformée en lieu culturel. Classée Monument Historique, elle accueille aujourd’hui des expositions d’art contemporain, et aussi des spectacles.

C’est ainsi que nous avons pu profiter de l’exposition de Bénédicte Vallet, plasticienne reconnue, intitulée « entre deux eaux », titre qui évoque l’ambivalence entre l’eau en tant qu’élément naturel et l’os, symbole de mémoire de la vie.
Ses créations faites de matériaux naturels, porcelaine tissée avec du chanvre, s’intègrent magnifiquement dans cet espace de pisé et de bois.

Pour le déjeuner, Margaret Mallion nous a ouvert, avec la simplicité et le joli sourire qui la caractérisent, son petit paradis au bord du lac de Paladru. Dans ce havre de paix, de fleurs et de verdure, inondé d’un soleil inespéré après le déluge de la veille, nous avons passé un moment merveilleux à partager les préparations des unes et des autres.
Nous avons poursuivi notre périple et à quelques kilomètres, Marc Bardin nous attendait pour nous faire visiter « la grange de Louisias », propriété familiale.
Avec passion, il nous a parlé de cet ensemble fait de pisé et de chaume, construit en 1805 par ses ancêtres, un des plus beaux exemples de l’architecture traditionnelle du Pays Voironnais, classé Monument Historique. Il n’en reste plus que 2 de ce type-là.
Cette grange a été construite avec les matériaux de l’époque : galets, pisé et chaume. Elle a nécessité beaucoup de main d’œuvre, trouvée dans le voisinage en échange de services ou de denrées.
Pour la solidité, le soubassement est en galets, pierres charriées par les torrents scellées avec des joints en terre naturelle. Les murs sont constitués de pisé, terre argileuse tassée, prélevée au printemps pour avoir « une terre en sève » de bonne cohésion pour qu’elle se colmate bien dans des banches.
La charpente est faite de bois provenant des forêts avoisinantes : châtaignier, merisier, hêtre, parfois du chêne. L’avant-toit déborde généreusement pour protéger les murs en pisé de la pluie.
Le toit est en chaume, constitué de paille de céréales, aujourd’hui de roseaux de Camargue, nés dans l’eau. Sa longévité est de 40 à 50 ans.
Cette grange servait au stockage du fourrage en partie supérieure et aux étables pour le bétail en partie inférieure.
Dans un élan passionné, le maître des lieux nous a fait un véritable cours sur le pisé et le chaume que nous avons écouté avec grand intérêt. Gourmandes que nous sommes, nous avons fait un détour par le magasin de l’exploitation pour nous approvisionner en fraises et confitures produites sur place.

Quelle belle journée ! Grâce à la chaleur du soleil et de l’amitié, nous avons vécu des moments inoubliables que nous allons précieusement engranger !

12.06. 2019 A.G.